par Anne Piselli, étudiante à l’école normale supérieure ayant réalisé son étude au sein du Club au printemps 2015
« Le département des sciences sociales de l’école normale supérieure propose la formation de Master « Pratiques de l’interdisciplinarité dans les sciences sociales » (PDI).
Le master PDI accueille les étudiantes et étudiants qui souhaitent se former à la recherche interdisciplinaire en sciences sociales. Il les prépare aux professions d’enseignants, de chercheurs ou d’intermédiaires culturels. Il regroupe des étudiantes et étudiants issus notamment de licences d’anthropologie, de sociologie, d’histoire, de science politique et de cursus bi-disciplinaires ou d’instituts d’études politiques. Il s’adresse aussi à des étudiantes et étudiants en reprise d’études qui souhaitent réfléchir sur leurs pratiques professionnelles ».
Dans le cadre de mon master 2 à l’ENS, j’ai choisi, sous la direction de Bertrand Müller, dont les travaux de recherche portent principalement sur les formes matérielles du travail intellectuel et notamment sur leurs transformations à l’ère du numérique, de réaliser une étude sur les logiques sociales, liées aux transformations des outils numériques, configurant la profession de responsable de l’archivage managérial au sein de grands groupes industriels et d’établissements publics français. Mon terrain a été mené au printemps 2015 au sein du CR2PA par le recueil d’un matériau classique constitué d’observations, d’entretiens ainsi que d’une approche quantitative s’appuyant sur le recueil de documents en cours d’enquête.
Le but de cette étude ethnographique était de s’attacher à la part de social qui configure la profession de responsable de l’archivage managérial dans ses logiques sociales d’appropriation du numérique.
Je remercie Marie-Anne Chabin ainsi que les membres du club CR2PA pour leur accueil dans le cadre de mon étude.
D’une part, il a été question de suivre les trajectoires personnelles de ces acteurs, afin de mieux comprendre comment ils étaient parvenus à assumer la responsabilité d’une fonction d’archivage en pleine mutation, comment ils avaient intégré les nouveaux outils numériques, et, d’autre part, il s’est agi, en parallèle, de suivre les transformations des dispositifs techniques avec lesquels ils travaillent au quotidien. Ainsi, ce travail a permis de mieux comprendre, à partir de l’étude des données, c’est à dire d’un point de départ très matériel, quels étaient les critères sociaux qui permettaient de caractériser l’organisation humaine dans l’entreprise. Quoi de plus pertinent pour sonder les comportements sociaux de l’entreprise à l’ère du numérique que d’étudier les logiques de la gestion de l’information qui circule dans l’entreprise au travers de l’analyse des pratiques de cette profession transverse mettant en relation tous les acteurs sociaux de l’entreprise.
L’étude des comportements sociaux, étudiés à partir des données d’entreprise est encore assez inédite. Donner une signification sociologique aux pratiques de ces professionnels était une tâche assez difficile. Il fallait trouver un ton nouveau car peu de travaux avaient été entrepris sur ce thème. Mais ce fût, aussi, et par conséquent, l’intérêt de ce travail de recherche. Il a été passionnant de pouvoir apporter, au travers de cette enquête, grâce aux observations et aux propos recueillis, des éléments de démonstration et de preuve quant à cette nouvelle approche des pratiques des gestionnaires de données dans l’entreprise dans le nouveau monde de l’information.
Il est important de noter que le fait d’avoir interrogé des cadres de la gestion de l’information issus de grands groupes industriels et d’établissements publics français, notamment, a permis de recueillir un matériau d’une grande richesse permettant de revenir sur des pratiques qui sont rarement détaillées dans un contexte académique anthropologique et sociologique.
Le terrain a ainsi pu donner des éclairages nouveaux sur la gestion de la connaissance et des savoirs au sein de l’entreprise et, plus largement, au sein de la société. En effet, depuis plus de trente ans, le développement des techniques a modifié, progressivement, les façons de communiquer et cela a bouleversé les processus de connaissances. A partir de là, les formes matérielles du travail intellectuel n’ont cessé de se transformer. L’introduction des nouvelles technologies dans l’entreprise s’est faite d’une façon stratifiée. S’intéresser à la dimension sociologique d’une profession, les gestionnaires de données dans l’entreprise nous a donc permis de percevoir les éléments de temporalité dans lesquels notre société s’est transformée en parallèle de la modification des techniques.
Les données de l’étude de la trajectoire des responsables d’archivage managérial seront mises à disposition des adhérents du CR2PA.